La traversée devait durer une petite semaine mais nous avons voulu faire durer le plaisir et nous avons préféré la faire en dix jours, et au près parce que le vent dans le dos c'est vraiment trop facile.
Première partie: la longue déroute (de dimanche 28 février à mercredi 3 mars)
Notre stratégie initiale, qui était de longer la côte vers le nord s'est avérée impraticable, avec le courant contre nous et un vent de plus en plus faible. Quand on a commencé à reculer vers le sud, on s'est dit qu'il était temps de changer de tactique et nous nous sommes résignés à nous éloigner de la côte. Le vent étant faible voire inexistant, il nous a fallu faire trois jours de zigzags pour réussir à s'éloigner suffisemment vers l'est. On a gagné également quelques milles vers le sud par la même occasion, ce qui n'était pas exactement la direction souhaitée, mais avec le vent en face on ne fait pas toujours le cap qu'on veut.
Progression vers l'est: 277 miles (sur 220 à faire)
Progression vers le nord: 87 miles (sur 350 à faire)
Voiles: grand voile et génois léger
Mal de mer: (sur une échelle de 0 - chouette je peux faire la cuisine sans aller regarder l'horizon toutes les cinq secondes; à 10 - vite, un seau): 6 descendant à 3 en fin de période
Moral: de mieux en mieux pour moi, car le temps calme a favorisé la diminution du mal de mer, de pire en pire pour Axel que notre progression chaotique et l'absence de vent a fait beaucoup rager, et qui a dû barrer à la place du régulateur d'allure lorsque le vent tombait trop.
Deuxième partie: un long bord vers le nord (jeudi 4 à mardi 9)
Au bout d'un moment nous avons fini par trouver un peu de vent, et dans une direction qui nous a permis d'aller jusqu'à João Pessoa sans faire de zig-zags supplémentaires (d'un seul bord, diront les spécialistes) - mais toujours au près, il ne faut pas trop en demander. Le vent s'est maintenu assez fort, ce qui nous a permis de faire le reste du trajet, certes couchés, mais en un temps record (enfin, surtout quand on compare à l'allure de tortue ivre à laquelle on avait marché jusque là).
Progression vers l'est: - 57 miles
Progression vers le nord: 263 miles
Voiles: grand voile avec un ou deux ris, et génois lourd arisé, ou non selon la force du vent.
Mal de mer: 8 se stabilisant à 5 en fin de période.
Moral: de mieux en mieux pour Axel, rendu tout guilleret par notre vitesse, et insensible à l'inconfort du près. Le mien a été plutôt affecté par la recrudescence du mal de mer, moi qui commençait à me dire que finalement le près ce n'est pas si terrible que ça, j'ai été très déçue.
Nous avons terminé en beauté par une magnifique manoeuvre de mouillage à la voile, ce qui a épaté tous nos voisins de mouillage, qui ont plutôt l'habitude de voir les voiliers mouiller au moteur. D'ailleurs, tous ceux qu'on a croisé sur le chemin des douches ont commencé les présentations par un "ah, c'est vous qui êtes arrivés à la voile!" admiratif. Evidemment, quand on leur a expliqué que notre obstination à ne pas utiliser le moteur a doublé notre temps de trajet ils ont eu l'air de trouver ça moins admirable. On ne peut pas tout avoir...